30 августа колоритнейшей французский лексикограф Ален Рей (Alain Rey) будет праздновать свой восемьдесят восьмой день рождения. Autodidacte уже рассказывал об этой яркой личности: вспомните, к примеру, такие наши заметки о нем, как Демонический Ален Рей, или Ален Рей о жизни слов.
В свои неполные 88 лет Ален Рей просто поражает ясностью и точностью мысли. А о его любви к французскому языку можно слагать баллады, поэмы, ну, или на крайний случай, легенды.
В начале августа Ален Рей дал интервью французскому изданию Le Parisien. Было бы грешно пройти мимо рассуждений мэтра о французском языке и источниках его развития.
Заметка небольшая, но любопытная. Привожу ее здесь en français и in extenso.
Alain Rey : « Sans le rap, la langue serait momifiée »
Alain Rey. © (LP/Olivier Corsan.)
TENDANCE. Le rap truste les ventes, chez les disquaires comme sur Internet, avec des valeurs sûres mais aussi de nouveaux artistes, comme le Marseillais Jul. Une lame de fond, avec des textes ambitieux.
Il a beau avoir 87 ans, Alain Rey veille toujours sur la langue française, même celle utilisée dans le rap. Le linguiste (Dernier ouvrage paru : « Pourvu qu’on ait l’ivresse » en collaboration avec Lassaâd Metoui, Ed. Robert Laffont. — Le Parisien) très médiatique que l’on retrouve tout au long de l’année sur France Inter nous livre son analyse du hip-hop hexagonal.
Est-ce que le succès du rap est une bonne chose pour la langue française ?
ALAIN REY. Oui parce que sans ce genre de musique, elle serait momifiée. Une langue est vivante quand elle comporte des éléments créatifs. Ce qui est le cas dans le domaine du rap.
De quelle façon ?
Contrairement à la poésie moderne, le rap s’appuie sur la rime. C’est elle qui va déclencher un vocabulaire particulier. Par ailleurs, l’écriture rap doit respecter un rythme. Donc le langage va être aussi utilisé comme un matériau. Et sur le fond aussi ça a évolué. Au départ, c’est un mode d’expression contestataire propre à une communauté raciale ou sociale. Aujourd’hui, cette musique s’est popularisée et son langage correspond plus à une génération qu’à une classe sociale. L’idée est d’utiliser des mots qui ne sont pas ceux des parents.
Pourtant, certaines expressions semblent arriver d’un autre temps comme « daron » pour « père »…
On l’utilisait dans le milieu de la délinquance au XIXe siècle. On peut le trouver dans « les Misérables » de Victor Hugo ou « les Mystères de Paris » d’Eugène Sue. Aujourd’hui, il est repris comme objet de curiosité. Même chose pour la « thune » que l’on entend beaucoup dans le rap. Ce n’est pas un hasard. C’était une unité monétaire de la Renaissance utilisée ensuite dans le langage des voleurs. Aujourd’hui, le terme est lié à une forme de contestation politique.
Le langage est aussi de plus en plus métissé. Est-ce positif ?
Oui. Tout est une question de dosage. C’est normal que les jeunes aient un français modifié par leurs origines créoles, arabes ou berbères. Ça fait partie de la vivacité de la langue.
Source(s): Le Parisien